Parlons hypnose !

Hypnose : entre peur et fascination

L’hypnose, il faut l’avouer, est perçue par une très grande partie de la population, comme quelque chose de malsain, du lavage de cerveau, ou même de magique pour certains. En effet, un grand nombre de personnes à qui j’ai parlé de ma pratique m’ont  souvent dit : « je n’aurais pas confiance », « j’aurais l’impression ne plus être moi-même, de perdre le contrôle et donc d’être à la merci des idées les plus folles de l’hypnothérapeute qui m’accompagne ». D’autres m’ont dit croire en « la magie merveilleuse de l’hypnose » pour résoudre tous leurs problèmes.

Cette vision de l’hypnose est très souvent véhiculée par le cinéma ou la télévision, où un des héros du film est complètement à la merci d’une personne malveillante. Ayant été  hypnotisé au préalable, le héros exécute d’innombrables forfaits, larcins, cambriolages ou meurtres, sans que  celui-ci ne soit conscient de ce qu’il fait (mais le héros gagne toujours et le méchant fini en prison…la morale est sauve !) : bref, il y a mieux pour mettre en confiance !!  Sans compter évidemment sur les hypnotiseurs de spectacle qui ont répandu également cette image de perte de contrôle.

Une réalité bien différente !

« Je me rappelle de tout ce que vous avez dit, ce n’est pas normal ! » Madame P.

Avant d’aller plus loin pour expliquer ce qu’est l’hypnose, il faut éclaircir tout de suite ces préoccupations susmentionnées.

Contrairement à ces croyances, l’hypnose n’est pas un état de soumission, ni de perte de contrôle durant lequel le sujet perd connaissance. Celui-ci peut entendre tout ce qui se passe autour de lui durant la séance et même dialoguer avec le thérapeute. En effet, un bon nombre de mes patients, après leur toute première expérience hypnotique, m’a dit souvent la même chose : « c’est étrange, je vous ai entendu tout le temps durant la séance », « je me rappelle de tout ce que vous avez dit, ce n’est pas normal ! ». Certains patients, bien qu’ayant ces mêmes idées préconçues sur l’hypnose, et qu’ils ont réussi à surpasser en venant me voir, m’ont dit également « vous êtes sûr que ça a marché ? Je ne pense pas avoir été du tout en état de transe, car je sentais tout ce qui se passait autour de moi et n’ai pas perdu ma vigilance ? ».  Pourtant, chacun était en état d’hypnose ! En effet, un hypnothérapeute apprend à reconnaître les signes caractéristiques de la transe et toutes ces personnes, sans exception, les ont manifestés.

De même, si une suggestion ne convient pas au patient, il peut la rejeter librement et s’il le souhaite, le patient peut sortir à tout moment de l’état d’hypnose : il reste maître de la situation à tout moment.

Il est important de savoir que l’hypnose thérapeutique, que je pratique, est dite éricksonienne (du nom de Milton Erickson qui a élaboré cette forme de thérapie).  Cette méthode laisse le sujet résoudre son problème sans intervention directe du thérapeute qui lui pourrait lui dicter la solution : il s’agit d’accompagner le sujet en état de transe en lui offrant plusieurs alternatives, celui-ci étant libre de les approuver ou de les rejeter. Ce type d’hypnose, dite également permissive, cherche à ce que le sujet trouve ses propres solutions avec ses propres choix : c’est non seulement beaucoup plus enrichissant pour le  patient, plus respectueux, mais surtout, plus efficace !

L’hypnose, en fait, c’est quoi ?

En 1994, la Division of PsychologicalHypnosis of American Psychological Association publie une définition officielle de l’hypnose (1):

« L’hypnose est une procédure durant laquelle un professionnel suggère une modification de l’expérience à l’origine du problème d’un patient, sujet ou client, au niveau de ses sensations, ses perceptions, ses pensées ou son comportement. Certains décrivent la transe en termes d’état modifié de conscience. D’autres la décrivent comme un état normal d’attention focalisée, dans lequel ils se sentent très calmes et détendus.»

Ainsi, en vivant pleinement une sensation de changement en état de transe, la personne l’intègre comme un nouvel apprentissage et génère par la suite de nouveaux comportements. L’hypnose amplifie ou  désamplifie une expérience. Elle peut être considérée comme un état de concentration intérieure dans lequel la partie consciente du sujet est focalisée sur une seule idée et devient ainsi indifférent à toute autre considération. Pour exemple,  lorsque nous sommes très absorbés par un jeu, une lecture ou la télévision, que le monde se restreint juste à notre activité,  nous n’entendons plus rien de ce qui se passe à côté.

MiIton Erickson disait que « l’hypnothérapeute durant une séance présente des informations, suggère des perspectives, suscite la volonté d’expérimenter de nouvelles idées et de nouveaux comportements, explore les possibilités et permet aux patients de braver les limites qu’il s’est lui-même imposées » (2). En conséquence, ce que l’hypnose a d’unique en tant qu’outil thérapeutique, c’est sa capacité  à donner accès aux ressources utiles que la personne possède, qui sont méconnues et inutilisées, et de pouvoir les mobiliser pour se sentir mieux.

« L’état hypnotique permet d’obtenir un fonctionnement cérébral quasi identique à celui où le sujet vit réellement la scène en question. »

A titre d’exemple, en 2006, une équipe de scientifiques s’est penchée sur l’intensité des perceptions sous hypnose. Des mesures au PET-scan (technique qui permet de mesurer et visualiser l’activité cérébrale) entre un sujet réveillé et un sujet en transe ont révélé que l’évocation d’un souvenir chez le sujet réveillé impliquait juste la zone du souvenir, zone restant habituellement inactive lorsque la personne ne pense à rien. Par contre, l’évocation d’un souvenir sous hypnose active les zones cérébrales impliquées dans la vision, le touché, et d’autres zones cognitives comme l’ouïe, l’odorat et le  goût.  En effet, les sujets de l’étude ont confirmé ces données. Ils ont évoqué le fait d’avoir revécu en hypnose le souvenir dans toute sa sensorialité,  tant au niveau visuel,  qu’olfactif et que des sensations tactiles, (etc.) alors  qu’ils n’ont évoqué qu’une simple remémoration en état d’éveil normal. L’état hypnotique permet donc d’obtenir un fonctionnement cérébral quasi identique à celui où le sujet vit réellement la scène en question (3).

  1. Psychological AA. Definition and description of hypnosis. ContemporyHypnosis. 1994 ; 11 : 142-5
  2. Erickson M, Rossi E, L’intégrale des articles de Milton Erickson sur l’hypnose : Tome 1, De la nature de l’hypnose et de la suggestion.
  3. Faymonville ME, Boly M, Laureys S, Functionalneuroanatomy of the hypnotic state. Journal of Physiology, Paris. 2006 ; 99 (4-6) : 463-69